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Il était une fois la schizophrénie...

26 avril 2012

Un ptit cul devenu grand

Hier soir je travaillais en psy, dans le cadre d'un service privé pour un jeune autiste, Il dormait à poings fermés tandis que je lisais tranquillement dans le couloir à la porte de sa chambre, tout en effectuant ma surveillance.

2 portes plus loin il y avait un homme, que j'ai deviné schizophrène dès que j'ai mis les pieds dans le département. Évidemment, il n'allait pas bien, totalement décompensé. Plus tôt dans la soirée, alors que je me promenais avec mon jeune ami il me fixait, parfois me suivait, presque agressivement. Une fois il a même houspillé contre moi, après que j'aie passé près de lui avec un tablier en mains. Il était incommodé par les "snaps métaliques", et pensait que je lui voulais du mal. Bref, déjà debout il n'était pas bien alors quand les lumières se sont éteintes et qu'est venue l'heure du coucher, les symptômes se sont décuplés.

Toute seule à la lueur d'une simple lampe, et au bout du couloir, je ne me sentais pas bien brave. Il circulait beaucoup et je m'inquìétais qu'il m'arrive dans le dos et me fasse quelque chose, dans son délire.

Jusque là, j'éprouvais une distance toute professionnelle envers ce patient.

Mais, à la noirceur, moi toute seule dans mon coin, et lui dans son monde, j'étais à l'écoute. Au début bien involontairement, mais puisqu'il était à quelques mètres de moi, il était difficile à manquer. Très agité, il circulait sans arrêt, éructait, crachait, jurait, il faisait tous les temps. Je l'entendais invectiver quelqu'un, lui disant de le lâcher, le menaçait de lui faire la peau s'il le lâchait pas. 

Mon Dieu qu'il était mal cet homme. Tourmenté au plus profond de son être, de son âme.

Et là, peu à peu j'ai perdu ma distance professionnelle, elle s'est effritée comme la glace au soleil...

Je pensais à cet homme d'âge mûr, probablement sans parent, peut-être avec une famille, ou peut-être pas. Cet homme, tellement, tellement seul, dans ce corridor silencieux si ça n'était de l'écho de ses cris...ou au contraire, pas assez seul??? en compagnie de ses démons.
Cet homme avait déjà été un enfant, probablement désiré, choyé par ses parents, les faisant rire, les comblant de joies...tsé, un vrai ptit cul bien normal, avec des amis, jouant aux cowboys en vélo, un ptit tannant à l'école qui devait coller sa gomme sous son pupitre...

Un petit être normal, avec des neurones normales.

Puis un jour il est devenu grand, il a pris de l`âge, du poids, du poil au menton, la vie a passé, tranquille, comme pour tous et chacun. Mais lui, il est devenu cet être au cerveau malade.

Évidemment, j'ai fait de la grosse, super grosse projection. Comment l'éviter, avec le nez dessus?..
J'étais là, dans mon coin, à pleurer en silence, sur mon fils, sur moi, sur mes autres enfants qui souffrent aussi, sans le dire. 
J'avais envie d'aller lui prendre la main, le rassurer, lui offrir réconfort et sécurité, de sortir cape et épée pour chasser ses démons.
Les siens, et peut-être aussi, un peu, les miens.

 

 

 

 

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12 avril 2012

J'ai rien fait, qu'il m'a dit

Ces derniers jours, je discutais avec mon fils. C'est rare qu'on parle de sa maladie. Là, il m'a exprimé sa colère; il m'en veut énormément. Il s'est senti abandonné pendant ses années d'hospitalisation et de réadaptation.
Comment lui expliquer, comment lui faire comprendre que c'était pour son bien, qu'il était tellement, tellement malade, et qu'il avait besoin de soins, et d'attentions, et de constance, et de limites fermes et de plein de choses qu'à moins d'y travailler à plein temps, je n'aurais pu lui procurer.
Comment faire? alors que l'existence même de sa maladie ne fait pas partie de sa réalité.
J'ai argumenté, car en plus, il était sous ordonnance et donc, techniquement, j'avais pas vraiment le choix non plus.
Et c'est là qu'il m'a dit que j'ai rien fait pour les empêcher.

Culpabilité, hein, quand tu nous tiens.

Je n'aurai jamais sa compréhension, ni son acceptation, et encore moins la reconnaissance de ne jamais l'avoir laissé tomber.

Parce que selon mon point de vue, j'ai toujours été là, chaque jour, chaque visite, chaque rencontre, chaque sortie, chaque fête, chaque plan, chaque fin de semaine, chaque...tout.

Ya rien à parlementer, son idée est faite. Et pour toute la vie, tel qu'est construit son esprit, je serai coupable.

10 avril 2012

Un homme d'exception

 

Sur YouTube on peut voir la bande-annonce de cet excellent film: http://youtu.be/zJyugVPEsUE
Et voici ce que Wikipédia en dit: http://fr.wikipedia.org/wiki/Un_homme_d'exception

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6 avril 2012

Ça s'est passé comme ça

Je ne sais plus comment ça a réellement commencé.
En Secondaire 1, il a redoublé son année. Il l'a donc refait. Ces 2 années ont été difficiles. Il était récalcitrant, opposant, il semblait consommer de la drogue et il avait l'air de consommer de l'alcool. Je ne raffolais pas trop de son groupe d'amis mais il ne jurait que par eux. À cette époque, je n'avais pas encore connu les bienfaits de la thérapie et donc, je me montrais sévère et intransigeante, ainsi que mon ex-mari. Je pense qu'à un moment, on ne savait plus trop où donner de la tête.

C'est le coeur gros que je repense à cette période.

Je savais que ça n'allait pas. Mais jamais au grand jamais je me serais douté de ce qui se préparait!

J'ai consulté les intervenants de l'école.
Je soulignais les difficultés scolaires de mon fils, je réclamais aide et soutien. Professeurs surchargés et souvent absents, direction indifférente, c'était pas fort. La psy avait évalué un problème d'attention (ainsi qu'à mon autre fils).
Côté physiologique j'ai consulté médecin, pédiatre. Tout semblait correct, bonne santé, pas de mononucléose, dépistage de drogue négatif.
Au privé on a consulté un psychologue. Il nous a écouté et a tenté de nous aider en nous faisant un plan de vie, que nous avons signé. Contrat jamais respecté, évidemment.
Au CLSC, on a eu un suivi aussi. Un peu pour mon fils, un peu pour ma fille, beaucoup pour moi.

À cette même époque, notre famille a traversé diverses épreuves qui n'ont sans doute pas aidé.
Ma grand-mère a souffert d'Alzheimer + un cancer rectal et nous l'avons hébergée 8 mois, soit jusqu'à quelques mois avant son décès en 2005.
Cette situation a causé un grave éclatement familial du côté maternel.
Puis ya mon ex-mari qui a développé une maladie invalidante; il souffrait de douleurs chroniques intenses, en lien avec son diabète. Une polyneuropathie diabétique dégénérative. Ça l'a amené à consommer beaucoup de médicaments et son caractère a changé. Il était devenu exécrable, notamment avec Max. Vraiment exécrable.

Et comme Max avait son ptit caractère, déjà passablement opposant, et l'autre en rajoutait sans aucune gêne, ça faisait facilement des flamèches.
Et c'est ainsi, dans un lourd conflit, que Max a appris qu'il n'était pas son père.

L'opposition venait de diverses manières.
Parfois il ne voulait pas s'habiller pour aller dehors alors qu'il faisait très froid. Il avait une résistance incroyable à toute forme de raisonnement. D'autres fois, il manquait de jugement dans certaines situations, et vu son intelligence, c'en était abérrant. C'est aussi à cette époque qu'il a refusé de faire couper ses cheveux.
J'ignore si c'était le début des symptômes, en mode léger.

Plus tard, quand est venu le temps de la séparation, du divorce, ça a été très dur. Les dernières semaines de cohabitation étaient à la limite de la violence conjugale et envers Max, mon ex s'est même permis de le frapper.
C'était tellement odieux que les policiers ont dû intervenir plusieurs fois jusqu'à ce que finalement je choisisse de quitter la maison avec mes enfants, de contacter une avocate, et d'entreprendre les démarche pour réintégrer légalement le domicile tandis que lui en sortait.
Nous avons été hébergés pendant 5 semaines chez un ami dans des conditions assez difficiles. Nous étions en sécurité, mais en situation précaire. On était 5 dans la même chambre, avec le strict minimum de nos effets personnels, manque d'argent, beaucoup de voyagement pour aller à l'école. Bref, c'était vraiment difficile.

Pendant ces 5 semaines, j'ai remarqué un énorme changement chez mon fils.
Il s'isolait, parlait peu, passait des heures couché à regarder des films, il oubliait ses choses, était désorganisé. Mon 2ème fils m'a dit à cette époque que les jeunes à l'école le surnommaient "le psychopathe"!! Je demandais pourquoi, et il a dit "Je sais pas...à cause d'une fille peut-être...et parce qu'il regarde le monde drôlement."
C'en est resté là sur ce point.

Une fois, on passait devant la crémerie et plusieurs personnes mangeaient leurs cornets sur la terrasse extérieure. Il a voulu savoir qui étaient ces gens. Je ne comprenais pas trop le sens de la question, je croyais qu'il niaisait. C'était des clients, tout simplement. Mais non, lui il voulait savoir QUI ils étaient.

Parfois, il fixait les airs d'un regard illuminé, un peu comme s'il voyait des anges, ou Dieu dans le ciel...il avait l'air tout heureux et souriait béatement. Parfois il marmonnait, tout bas, et se mettait à rire comme pour lui-même. Au début c'était discret.

Je reportais la responsabilité sur la précarité de notre situation.

Plus tard, quand on est revenus à la maison, ça s'est agravé.

Il passait des fins de semaine complètes dans sa chambre, il attachait sa porte de l'intérieur avec des cordons. Aussi, il passait des heures assis dans un fauteuil, enroulé dans une doudou, les pieds sur le lit, à regarder dans le vide. Parfois il se mettait à rire, sans raison.
J'ai tenté de lui parler, de le raisonner, de lui secouer les puces. Je craignais qu'il se drogue, je lui demandais qu'est-ce qu'il avait pris qui le mettait dans cet état.
J'étais vraiment certaine qu'il avait consommé une cochonnerie...

Une fois, je lui parlais, et ses yeux se sont mis à "tilter" dans les coins.
Je ne savais plus quoi faire. J'étais inquiète, en colère même! j'étais certaine, tellement certaine qu'il consommait des drogues impures et dangeureuses. 

Il riait de moi quand je mentionnais que je souhaitais l'emmener à l'hôpital.

Puis un jour l'école m'a convoquée. La directrice m'a annoncé cette triste nouvelle comme quoi il avait posé des gestes déplacés envers une fille de l'école. Il la suivait, la regardait constamment et déplaisamment. Le père a déclaré qu'à la prochaine offense, il contacterait la police. Sur ce, l'éducateur spécialisé de l'école s'est joint à la rencontre et m'a fortement recommandé d'emmener mon fils à l'hôpital.
Il était reconnu comme un grand consommateur de drogues.

Nous sommes donc allés à l'hôpital et il a été admis en pédo-psychiatrie.
Nous ne le savions pas encore mais nos vies venaient de basculer.

C'était en mai 2007. Il venait tout juste d'avoir 15 ans.
Je ne sais pas s'il existe quelque chose de plus cruel, que ce soit pour un enfant, ou pour une mère: Il n'est jamais revenu habiter à la maison.

 

5 avril 2012

Avant

Avant, c'était un ptit garçon comme les autres.
Cétait un beau bonhomme, fin, drôle, intelligent, moqueur, curieux, vif, sportif, gourmand.
Il aimait faire du vélo, se baigner, jouer au soccer et au Nintendo, cuisiner, bâtir des forts dans la neige, il était toujours entouré d'amis. Il était passionné de jeux de construction tels que Lego et K-Nex. Il passait des heures et des heures à reproduire des modèles en suivant minutieusement des plans compliqués.
C'était un ptit moqueur, qui aimait bien taquiner sa soeur et la faire fâcher. Il réussissait bien à l'école et rêvait de devenir architecte.
Il a grandi dans un milieu de belle qualité.
J'ai eu la chance de pouvoir rester à la maison pendant 10 ans pour élever mes enfants.
Max fait parti de ces enfants qui n'ont que rarement été gardés.
Les enfants avaient chacun leur chambre, une grande salle de jeux. Nous avions une belle maison, une piscine, des fleurs, des balançoires. Mes enfants ont grandi dans une certaine aisance, avec beaucoup d'attention, et des activités de qualité. J'étais une maman dévouée à mes enfants.
J'ai toujours favorisé les sorties familiales, cinéma, Parc Safari, La Ronde, Les Glissades, les foires agricoles, etc. Plus tard, j'allais en camping avec eux. Puis, individuellement, j'aimais bien à chaque saison offrir à mes enfants une activité particulière telle que natation, patinage, baseball, karaté, soccer, etc.

Tout ça pour dire que mes enfants n'ont manqué de rien. Ça me rassure toujours un peu de me répéter ça. J'ai beau savoir que ça n'a rien à voir mais je suis un as dans l'art de me culpabiliser.
J'ai cherché, j'ai bien cherché, dans mes souvenirs et sur toutes les photos, à quel moment ça a commencé à mal aller, ou encore, pourquoi ça s'est mis à mal aller.

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5 avril 2012

Il était une fois la schizophrénie...

La schizophrénie, cette terrible maladie, est entrée dans ma vie en 2007.
Avant, tout semblait bien aller; j'étais la fière maman de 3 beaux enfants en santé. J'étais loin de me douter que la vie de l'un d'entre eux, que toutes nos vies allaient basculer sous peu.

Je crée ce blog aujourd'hui pour soulager mon besoin d'en parler, de partager mes expériences, mon vécu, ma douleur, mes efforts d'acceptation.
Mon fils nie sa maladie, et évidemment il déteste que j'en parle. Pourtant, j'ai tellement de choses à dire, à raconter, tellement aussi à partager, peut-être avec d'autres parents qui vivent une situation similiaire.
Par respect pour le tabou qu'il exige, je me sens souvent très seule. Nos proches ont beau savoir, ça n'empêche pas que le sujet est limité. Autrement, j'ai l'impression de le trahir.
Je le ferai donc de façon discrète, anonyme. Pour moi, rien que pour moi.
Parce qu'il y a des jours de joies bien sûr, mais aussi des jours de trop-plein, des jours de grande tristesse, des jours d'inquiétude, de rejet, de refus, de colère, ou même, oui oui!! même d'apitoiement...

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Il était une fois la schizophrénie...
  • La schizophrénie, cette terrible maladie, est entrée dans ma vie en 2007. Avant, tout semblait bien aller; j'étais la fière maman de 3 beaux enfants en santé. J'étais loin de me douter que tout allait bientôt basculer.
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